Lewis Mumford (1895-1990) n’est pas vraiment un activiste, comme on dit aux États-Unis, mais un « intellectuel public », qui n’hésite pas à dénoncer la bombe atomique au lendemain du bombardement d’Hiroshima et de Nagasaki, l’urbanisme au bulldozer de Robert Moses à New York, les agissements du Président Johnson au Vietnam. L’une de ses originalités et de ses forces est, chaque fois, de miser sur l’individu, sa capacité à devenir lui-même, malgré les obstacles de tous ordres.
Il milite pour un régionalisme décentralisé, une ville à « taille humaine », un équilibre entre l’industrie et l’agriculture, et surtout il adhère à cette idée neuve à l’époque d’une démocratie de l’entraide et de la plénitude. Son œuvre s’inscrit dans le prolongement d’une tradition méconnue de pensée communautaire qui débute avec les œuvres des géographes anarchistes Pierre Kropotkine et Élisée Reclus.
Critique d’une organisation économique qui sacrifie le progrès de l’humanité au perfectionnement des machines, il revient au souci du bien public, à la recherche d’un équilibre écologique et à la coopération sociale comme base de notre milieu de vie et nous aide à dénoncer les méfaits du « toujours plus » et du « gigantisme » propres au capitalisme actuel, afin de redonner à chacun sa part d’autonomie.